LA PORCELAINE... « ART MAJEUR »

 

C’est une belle chose que la porcelaine. Si en Chine, elle est connue depuis des siècles et des siècles, les Européens, et plus particulièrement, nous autres Français, le Grand siècle porcelainier est le XVIIIe. C’est à cette époque, que se créent de nombreuses manufactures, dont une Compagnie privée établie vers 1738, dans le château de Vincennes. Elle se voit accorder le privilège de fabriquer de la porcelaine «à la façon de Saxe». En 1753, Louis XV, sur les conseils de Madame de Pompadour, prend sous sa protection la fabrique de Vincennes et la dénomme «Royale des Porcelaines de France», avant de la faire transférer à Sèvres. Par la perfection de sa fabrication, de sa décoration, le renom de Sèvres dépasse nos frontières. Dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle, les monarques, les princes souhaitent apporter leur parrainage à des manufactures porcelainières : La reine Marie-Antoinette à la Rue Thiroux (Porcelaine à la Reine), le Comte d’Artois à Limoges, le Duc de Villeroy à Mennecy, le Comte de Provence à celle de Clignancourt…

Au Moyen-âge, le mot « porcelaine » désignait des coquillages nacrés aux reflets irisés. Au XIVe siècle, et par analogie, on entendait des terres cuites vernissées (les poteries hispano-mauresques, par exemple). Puis, jusqu’au troisième quart du XVIIe siècle, les porcelaines importées de Chine par les Hollandais et Portugais, s’appelèrent des « CARAQUES » (Krack-porceleijn qui signifie en hollandais porcelaine cassée). L’appellation savante est WAN-LI du nom du dernier Empereur de la dynastie MING.

La  demande européenne devient de plus en plus importante, les Hollandais ramènent du Japon et de la Chine des objets que l’on désigne sous le nom de porcelaine. Ils se révèlent disposer d’une curieuse  fascination auprès des Européens des XVIIe et XVIIIe  siècle. Ces Objets sont fabriqués dans une matière merveilleuse à la fois blanche (le gris ardoisé vient plus tard), translucide, d’une sonorité agréable et d’un décor varié. Elle exige des années d’acharnement dans la recherche afin de découvrir le secret de fabrication de la pâte, qui est faite, avec des matériaux en quantité variable, de quartz, de craie, de feldspath et de kaolin, sans oublier les analyses indispensables, pour obtenir une matière débarrassée de ses impuretés.

Avant que l’Europe ne fabrique sa propre porcelaine, des compagnies de transports  sont  créées  dont la  COMPAGNIE DES INDES FRANÇAISES, qui à l’image des Portugaises, des Hollandaises ou des Anglaises, transporte de Chine en France des quantités importantes de porcelaine, pour satisfaire la passion des français et des autres Européens. Chaque nation ambitionne de posséder des porcelaines qu’elle trouve plus précieuses, plus prestigieuses que la faïence. Elle envoie en Chine ses propres dessins de pièces et de décors, que les Chinois reproduisent avec talent.

A la fin du XVIe siècle, les Italiens de Florence réussirent quelques pièces de petites tailles. En France, dans la deuxième moitié du XVIIe, Rouen, puis Saint Cloud tentent de copier la qualité chinoise. Sans kaolin, le résultat est appelé «porcelaine tendre», que d’autres manufactures fabriquent dans le même temps. Outre, l’absence de kaolin, la maîtrise des degrés et des temps de cuisson ne se fait qu’au fil des années. Si bien, qu’en porcelaine nous ne trouvons que des petites pièces

 

En 1709, dans le Duché de Saxe, est découvert le premier gisement européen de Kaolin. En France la découverte est plus tardive : vers 1765 à SAINT YRIEX, près de Limoges.

Les grandes fontes de l’argenterie du début du XVIIIe siècle, exigées par Louis XIV pour financer ses guerres, amènent la noblesse à remplacer ses objets d’orfèvrerie à usage domestique ou décoratif par la faïence, puis la porcelaine.Cette dernière s’intègre progressivement dans la vie quotidienne avec des pièces de table, de toilette, d’éclairage…. Elle devient «objet d’art» dans la décoration des Palais Royaux et princiers, ainsi que dans les demeures des Grands de la Cour.

C’est sous Louis XV, que la porcelaine de décoration et d’ornementation atteint son apogée : vases, pots-pourris, garnitures de cheminées, fontaines…, sans oublier les belles pièces de forme provenant des services de table, beurriers, saucières, confituriers, légumiers, bols à punch… Les plus belles, les plus décoratives, sont parfois montées, sur or, vermeil, ou bronze. Les marchands-merciers font preuve d’ingéniosité et d’audace, afin de faire réaliser de véritables chefs d’œuvre. L’un d’eux Simon POIRIER en 1758, commande à Sèvres, un ensemble de plaques de porcelaine afin d’orner une commode destinée au Prince de CONDE. La mode des meubles à plaques de porcelaine est lancée. Les privilégiés de l’époque s’enthousiasment. De nos jours, des musées, des collections privées, des antiquaires permettent d’admirer ou d’acquérir quelques une de ces œuvres d’art extraordinaires, dont l’origine est la Chine, l’Allemagne, et la France…

 

Tout au long du XIXe siècle, la porcelaine de décoration continue de se développer. Sous le Second Empire, de nombreuses pièces du XVIIe et XVIIIe s’ornent de bronze. A Naples les décorateurs atteignent l’insolite avec des salons de Capodimonte où la porcelaine habille tous les murs, les miroirs, les lustres...        

  • LA PORCELAINE … ART MAJEUR, l’amateur peut être motivé pour plusieurs raisons, à la possession d’une pièce :
  • elle exerce une étonnante fascination, elle est source de satisfaction et de plaisir, de très grand peintres ont apporté leur concours dans la décoration :
  • elle représente un signe de réussite sociale ;
  • elle autorise toutes les fantaisies dans le domaine de la décoration : murales, vitrines, cheminées, et en mobilier ;
  • de par sa fragilité, elle devient rare et constitue un investissement.

 

 

Ronan Lelandais
Expert C.E.A. et C.E.D.E.A.
Fournisseur de Musées